L’impact du budget du Québec sur les institutions muséales
Pour faire suite au dépôt du budget du Québec 2015-2016 du 26 mars 2015 ainsi qu’au message que nous avons diffusé le 31 mars dernier, la Société des musées du Québec (SMQ) a obtenu plus de renseignements lui permettant de mieux informer ses membres, en ce qui concerne plus spécifiquement les institutions muséales.
Le 1er avril, le ministère de la Culture et des Communications (MCC) transmettait à la SMQ un certain nombre d’informations concernant le programme d’Aide au fonctionnement des institutions muséales (PAFIM), informations confirmées le même jour dans un communiqué du ministère. On y apprend alors que l’enveloppe de 17 M$ pour l’aide au fonctionnement des institutions muséales demeurera la même pour cette année de transition et que les institutions muséales qui étaient déjà reconnues et soutenues en 2014-2015 verront leur niveau de soutien maintenu. Aussi, le MCC prévoit faire l’envoi d’un premier versement à la fin du mois de mai, misant sur un processus accéléré pour le dépôt des demandes et leur traitement. Il est important de rappeler que la SMQ avait adressé à la ministre Hélène David une demande d’aide transitoire d’urgence de 3 M$ pour venir en aide aux institutions muséales en difficulté, quel que soit leur statut. Aucune réponse ne nous est parvenue de la ministre ou de son cabinet. Qui plus est, la rencontre prévue pour le 30 mars entre la SMQ et Madame David a été reportée à quelques jours d’avis.
D’autre part, c’est avec stupéfaction que la SMQ a appris que les centres d’exposition en arts visuels reconnus et soutenus au fonctionnement seront intégrés au Conseil des Arts et des Lettres du Québec (CALQ). Selon le CALQ, les 14 institutions muséales touchées sont les suivantes :
- Centre national d’exposition de Saguenay,
- Centre d’exposition de Saint-Hyacinthe Expression,
- Centre d’exposition en art actuel à Longueuil Plein Sud,
- Centre des arts de Shawinigan,
- Galerie d’art du Parc (Trois-Rivières),
- Galerie du Centre culturel de l’Université de Sherbrooke,
- Galerie d’art SBC (Montréal),
- Centre d’exposition L’Imagier (Gatineau),
- Centre d’art Rotary (La Sarre),
- Centre d’exposition d’Amos,
- Centre d’exposition de Val-d’Or,
- Salle Augustin-Chénier (Ville-Marie),
- Centre d’exposition Mont-Laurier,
- Galerie d’art du centre culturel de Drummondville.
Par ailleurs, l’aide au fonctionnement accordée par le MCC à ces institutions demeure stable et représente 1 735 700 $, soit environ 10 % de l’enveloppe consacrée au fonctionnement pour l’ensemble du réseau des institutions reconnues et soutenues. Cette somme sera transférée de façon permanente au CALQ qui l’intégrera à son programme d’aide aux organismes en arts visuels.
Notons qu’à l’instar de la SMQ, aucun centre d’exposition n’avait été consulté ni même informé de ce changement majeur. Qui plus est, dans son communiqué du 1er avril 2015, le MCC réfère au rapport du Groupe de travail sur l’avenir du réseau muséal québécois (rapport Corbo) pour justifier sa décision. Or aucune recommandation dudit rapport ne fait référence à un possible transfert des centres d’exposition. Le geste du Ministère soulève plusieurs questions dont celle, cruciale, de la reconnaissance même de la muséologie comme secteur regroupant plusieurs champs disciplinaires (art, histoire, sciences) et plusieurs types d’institutions (musée, centre d’exposition et lieu d’interprétation). De plus, au-delà des nombreuses questions de fonctionnement que pose ce transfert vers le CALQ (compétences en matière muséale, évaluation nationale, liens avec le réseau muséal, futur processus d’agrément, etc.), l’interrogation majeure concerne la possibilité pour les centres d’exposition ciblés de conserver pleinement leur identité d’institutions muséales. Cette question interpelle l’ensemble des institutions muséales puisqu’elle touche l’intégrité même du réseau. La SMQ a également eu confirmation de l’intention du MCC de transférer ses responsabilités envers les institutions muséales à caractère scientifique vers d’autres ministères en 2016-2017.
Musées d’État : budgets en régression
Les musées d’État subiront, encore une fois, des coupes de 5 % qui affecteront directement leurs ressources humaines et leur budget de fonctionnement. Les détails de cette mauvaise nouvelle, qui affaiblit nos grandes institutions muséales, seront connus lors de la défense des crédits, prévue pour la fin du mois d’avril. Est-il nécessaire de rappeler que ces restrictions financières affectent en fin de compte l’ensemble du réseau muséal?
Plan culturel numérique
Le MCC maintient le cap en ce qui a trait à la réalisation du Plan culturel numérique. Les budgets intégrés aux crédits réguliers devraient être confirmés sous peu. À titre de mandataire, la SMQ est à pied d’œuvre depuis plusieurs mois, entre autres pour la mise sur pied du programme spécifique aux institutions muséales (inscrit à la mesure 24 du Plan). Elle souhaite vivement que les mesures touchant le milieu muséal se concrétisent dans les meilleurs délais.
Fonds du patrimoine culturel québécois
Comme prévu, les budgets du Fonds du patrimoine culturel québécois, s’élevant au total à 16 M$ par exercice, seront reconduits. Le MCC nous a confirmé qu’il travaille actuellement à l’établissement d’une norme régissant l’ouverture du volet 4, qui serait consacré aux expositions permanentes et itinérantes, et ce, pour l’exercice 2015-2016.
Mécénat Placements Culture
Le programme Mécénat Placements Culture pérennisé en 2014-2015 conserve son enveloppe de 5 M$. Mis en place en 2005, ce programme est très important pour les institutions muséales, car il constitue un des rares leviers encourageant les collectes de fonds et la générosité des mécènes.
En conclusion
La défense des crédits, prévue pour la fin du mois d’avril, répondra peut-être aux questions qui demeurent en suspens. Quoi qu’il en soit, il apparaît clair que le manque à gagner pour un financement équitable et adéquat du réseau (bien démontré lors des États généraux de la SMQ et réaffirmé par le groupe de travail sur l’avenir du réseau muséal québécois mis sur pied par le MCC) ne fait que s’accroître. Alors que la situation financière est de plus en plus préoccupante, s’ajoute la grande inquiétude face au risque de fragmentation du réseau. Nous ne pouvons que constater que le MCC travaille toujours portes closes, tout comme s’il était investi d’une vision prévalant à l’écoute même du milieu muséal. Plus que jamais, il nous faudra prendre la parole, exprimer notre désaccord et faire valoir les réels besoins du réseau muséal québécois.